Chroniques de l’Agent Zak Diamond #9
Sur les traces de Guillaume
JOUR 455 / Partie 2
– “A tous les véhicules, on se rassemble au point zéro. “
Une fois le harnais débouclé, je visse sur ma tête le casque et rabat le masque facial. Le HUD m’indique que les systèmes d’assistances articulaires de l’exosquelette sont OK. Idem pour les systèmes de survie respiratoire et de thermo-régulation. Initialisation des capteurs de communication cryptée. Je suis paré. Je saisi mon B-G MKIV et attend les ordres.
– “Escouade de Delta unité. A mon signal, on sort des Scarabs, on se met en formation tactique et on fonce jusqu’au sas principal du bâtiment logistique. Couvrez à 360°. Le danger peut être partout. Si on rencontre la moindre résistance, vous connaissez les consignes. Top départ !”
Je sors rapidement par le côté co-pilote, suivant de près Delta 1, notre chef d’escouade. Nous sommes rejoint immédiatement par les autres agents. Nous progressons rapidement en formation. Les armes sont prêtes à tirer, la ligne de mire toujours dans le plan de notre vision.
Delta 1 et 2 couvrent l’avant. Delta 3 et 4 le flanc gauche, où se trouve le bâtiment que nous longeons. Le mur d’enceinte est truffé de recoins sombres. Je couvre le flanc droit avec Delta 6. Seul les carcasses fumantes des défenses détruites sont visibles de ce côté. Mais elles sont d’autant de caches d’où l’ennemi pourrait surgir inopinément.
Delta 7 surveille les hauteurs, positions propices aux embuscades. Enfin Delta 8 veille à nos arrières.
Nous arrivons aux portes des dépôts. Farad fait sauter le battant d’un boîtier mural d’un grand coup de pied-de-biche. Il examine quelques secondes un faisceau de fils multicolores, en coupe deux qu’il ligature rapidement. Un claquement sec suivi d’un grincement nous signale que la lourde porte est en train de s’ouvrir.
Nous nous faufilons maintenant dans l’énorme volume du dépôt logistique. Nous suivons un couloir formé par les immenses racks de rangement, où sont stockés toutes sortes de containers, caisses et autres contenants.
Delta 1 lève subitement le poing. Nous stoppons net notre progression et nous baissons discrètement.
– “Deux cibles droit devant, à l’étage. 5 et 7, ils sont pour vous.”
A 30 m de nous se dresse un mur. Une porte est visible. Nous devons l’emprunter. Mais au-dessus se trouve une baie panoramique, sûrement les bureaux du service d’intendance. Deux gardes armés scrutent la pénombre du dépôt. Probablement alertés par l’ouverture du sas extérieur.
Nous avançons de quelques pas avec N’guyen, à l’abri d’un container posé à terre devant nous.
D’un geste nous désignons notre cible respective. Je prend le garde de gauche. Nous épaulons nos blasters, dont la mire se synchronise au réticule de notre HUD. Je retiens ma respiration. J’aligne la tête de la cible…
– “Go !”
Simultanément, vitres et crânes explosent avec fracas. Nous attendons quelques secondes. Rien ne bouge.
D’un geste le Chef nous fait signe d’avancer vers la porte.
Elle est verrouillée. En l’absence de boîtier de contrôle, c’est Silvero qui prend l’affaire en main. Il dispose deux micro charges de Pyroplastic sur les verrous magnétiques. Nous nous éloignons un peu et nous plaquons contre le mur. A l’appui du boîtier de commande, dans un flash aveuglant, la porte s’arrache de son logement en tombant lourdement au sol.
Le temps que la fumée se disperse, nous franchissons l’ouverture et pénétrons dans un long couloir. Nous devons accéder au sous-sol pour emprunter un tunnel de service qui nous permettra de rejoindre un centre technique, hébergeant une salle informatique. La banque de données convoitée !
A ce moment je dois reconnaître la grande qualité du travail de la Division de l’Oeil, qui est parvenue à subtiliser les plans de la station, probablement dans les archives d’un architecte ou d’un entrepreneur. Il doit sûrement s’agir du meilleur service de renseignement de la galaxie.
Une fois descendu par un accès de service, nous arrivons au tunnel. Un grand couloir parcouru par des myriades de tuyaux divers, de chemins de câbles et de boîtiers de toutes formes. L’éclairage est minimal.
Alors que nous commençons à nous engager, la brève lueur d’un faisceau laser, accompagné du bruit caractéristique d’un pulseur, nous fait projeter à terre.
– “Suis touché bordel !
– Embuscade ! Tir de couverture ! Doc, occupe toi de Slutzier.”
Les tirs sont intenses. Quatre ou cinq hommes se sont tapis à l’autre extrémité du tunnel. Leurs laser nous empêchant de nous relever ou de faire marche arrière. Nous ripostons comme nous pouvons, espérant que le Doc puisse stabiliser l’état de Delta 6.
Aux grands maux les grands remèdes. Je parviens avec peine à prendre une mini roquettes dans une poche de mon brelage. Je l’insère dans la chambre du lance-roquette.
– “position de sécuritééé !!!”
Je sais que dans le confinement de ce tunnel, la déflagration causée par la charge explosive se répandra jusqu’à nous. Il n’y pas d’autre choix.
Je vise tant bien que mal le mur derrière nos assaillants, j’appuie sur la détente du tube. Dans un sifflement, le projectile fumant traverse le couloir, et une boule de feu suivie d’un énorme bang nous plaque face contre terre.
Les tirs ont cessé. Mon crâne est empli d’un larsène assourdissant. L’atmosphère est si opaque que nous passons en mode de vision nocturne.
– “ça va les gars ? Doc comment va Slutzier ?
– ça va Chef, j’ai connu pire. J’ai juste mal quand je ris…
– Un tir laser a touché l’épaule gauche. Rien de vital n’est atteint. La protection à été percée mais la brûlure est superficielle. Je cautérise, ça va prendre une minute. Avec une bonne dose d’antalgique tu vas être frais comme une bonne bière servie en terrasse.”
Au bout du tunnel, nous enjambons les amas de chairs fumantes de ce qui avait été cinq hommes. Nous empruntons un escalier pour remonter d’un niveau.
Le centre technique. Nous y sommes. Un dédale de couloirs desservant ateliers, bureaux d’étude et locaux techniques.
De la projection du plan dans son HUD, le Chef Bulek extrapole un itinéraire pour rejoindre la salle informatique.
– “Ok, on va au bout du couloir, puis celui de gauche, celui de droite. Et ce sera au fond de celui-là. Progression tactique, on couvre tous les côtés. En avant !”
Dans cette partie du bâtiment, la lumière est vive. Les revêtements de sol lustrés reflètent nos silhouettes surchargées par nos exosquelettes de combat EXC-Héraclès, et l’ensemble de notre armement et matériels que nous emportons. Difficile de ne pas briser le silence tant les cliquetis que nous générons sont important.
Nous observons chaque portes que nous croisons. Première bifurcation vers la gauche. Nous sécurisons la croisée de couloirs et reprenons la marche.
Deuxième croisée. Nous sécurisons et prenons à droite. Nous nous engageons dans le dernier couloir. Au fond, à une vingtaine de mètres, nous voyons une porte sécurisée sur laquelle est apposé un panneau indiquant “personnel autorisé uniquement”. La salle informatique et sa base de données !
Alors qu’il nous reste qu’une quinzaine de mètres à parcourir, la porte s’ouvre subitement. Trois hommes la franchissent rapidement. Instantanément nous reconnaissons les armures qu’ils portent : Des EXC de la phalange Noire ! Notre emblème bien visible sur le pectoral droit.
– “Ne bougez plus ! C’est l’escouade Delta ! Les gars qu’est ce que…”
Le Chef n’a pas le temps de finir sa phrase, qu’un premier tir atteint son masque facial qui part en éclat. Il s’écroule en arrière. Dans le même temps les trois soldats débutent un tir nourri en notre direction. Slutzier, sûrement handicapé par sa blessure à l’épaule, est le deuxième à tomber.
– “Bordel ! Tirez ! tirez ! C’est quoi ça ?”
Il nous faut une ou deux secondes pour sortir de notre état de surprise. Je cale mon B-G MKIV en épaulé-jeté et balance une rafale de plasma. Je touche le premier de plusieurs impacts de l’abdomen jusqu’à la poitrine. A peine s’il sursaute. Il continue même d’avancer tout en maintenant ses tirs.
Je vois le Doc se jeter à terre tout en balançant un tir de son Riot-gun double charge. La force cinétique de la double grappe de projectiles en titano-tungstène enfonce la cage thoracique de l’ennemi en le projetant deux mètres en arrière. Il ne se relèvera pas.
J’épaule mon arme, et vise instinctivement la jonction entre le casque et l’épaule. Un point faible de nos protections. Une rafale de trois. Le sang jaillit alors que la tête s’incline du côté opposé. Le fantassin s’affale sur le coté, tout en continuant à lancer une rafale.
Le troisième n’est plus qu’à cinq mètres de nous. Son EXC est criblé d’impacts. Comment est-il possible qu’il soit encore debout ?
L’agent Second-maître Diaz est dressé, en appui sur ses jambes. Il maintient sa multi-gatling à impulsion laser qui fait feu de toute sa puissance.
– “Delta 4 attention !!!”
Malgré le nombre d’impulsions laser qui le touchent, le font vaciller, le soldat arrive à redresser son arme, faire feu d’une rafale qui vient toucher Diaz. Ce dernier s’effondre à son tour.
A cet instant, une détonation sourde retentit. L’escouade est projetée au sol. Les restes du soldat disloqué sont projetés dans toutes les directions.
Alors que notre mitrailleur tombait au combat, j’avais chargé une roquette dans le tube de mon B-G MKIV et tiré à bout portant sur le dernier ennemi.
Nous sommes là. Hagards. Hébétés. Agenouillé près du corps du Chef, je regardais ce qu’il restait de sa protection faciale. Un trou ensanglanté.
– “C’est fini pour le Chef, Doc.
– Pour Slutzier aussi, merde….
– Diaz respire encore, bouge-toi Doc !”
Le Doc commence à déséquiper le sulfateur pour prodiguer les premiers soins. Il est inconscient.
Delta 2 donne l’ordre à N’Guyen de rester pour sécuriser la zone, en couverture du Doc.
Les trois restant nous nous dirigeons vers notre objectif.
En passant sur les cadavres des fantassins renégats de la phalange, j’aperçois un écusson inconnu sur une des épaules d’un EXC.
-“A.G.R.E.S. Qu’est ce que c’est ?
– Agence Gouvernementale de Recherches Enquêtes et Sécurité. Elle a été créée par Bieskvaller. Les mecs qui nous ont attaqué, vous avez vu ? C’est pas normal une telle résistance. Ce sont eux les cyber-soldats dont on nous avait parlé. Ce qu’on ne savait pas, c’est qu’il avait été les chercher chez nous…
– Si on avait su, le Chef ne serait pas mort. Les autres aussi. Putain !
– Ils s’en foutent. On est rien pour eux. De la chair à plasma. je dis, tu fais, et même pas un merci. Tu parles d’un boulot…
– En parlant de boulot, finissons le notre. Il faut télécharger les données. Après on repartira tous ensemble. On ne laissera personne.”
Nous entrons dans la pièce. Farad sort sa malette P-T 2.0 et commence à brancher ses connectiques aux baies informatiques. Au bout de quelques manipulations sur divers claviers, l’interface de son écran affiche une barre de progression. Le hack est en cours. Barre à 100 %. Il replie son matériel, et nous faisons demi-tour.