10 février 3304, Rapport d’évaluation du patient C23-AE327.
–Je peux le voir ?
-Salut Michael! Aucun problème, il est à toi. Après, ne t’attends pas à des miracles, le gars s’est vu mourir quand même.
-C’est à dire ?
-Syndrome post traumatique. De temps en temps il débloque…il se met à pleurer par ex. Ça peut se comprendre hein.
-Je n’en ai que pour quelques minutes. Merci toubib.
On m’avait chargé d’interroger les rescapés des attaques Thargoids depuis quelques temps déjà. Le LARA cherchait à en savoir le plus possible sur les bestioles et je devais collecter les récits de combat, au cas où on aurait pu identifier des failles dans les techniques de combat des Thargos. Plus récemment mon boss m’avait demandé de focaliser sur ceux chopés en train de flotter dans le vide à proximité des épaves de corvettes fédérales ou de T10. Les Basilisks étaient toujours aussi difficile à buter; alors toutes les infos étaient bonnes à prendre…
Mon client du jour s’appelait Henry Riccardo Da Silva Ramos…Ca commençait bien, déjà rien que son nom à rallonge aurait dû me faire dire que ca ne durerait pas juste 5 minutes…
–Bonjour Henry! Vous êtes originaire d’Alliot si mes infos sont justes, et vous finissez en plein champ de tir Thargoid à bord d’une corvette fédérale, au cœur des pléiades. Vous m’expliquez comment c’est possible de tourner aussi mal ?
La vanne était pourrie mais ça a eu l’effet escompté. Henry sourit et sembla se détendre.
–Je ne suis pas militaire; je suis ingénieur. Nous étions toute une équipe embarquée dans la corvette, à faire des relevés télémétriques sur le prototype. On devait rester en dehors du combat. Je sais pas pourquoi c’est nous que le Thargo a pris pour cible finalement. Ca a vite mal tourné. Le Commandant a rapidement ordonné notre évacuation d’urgence. Mais malgré ça, la plupart de mes collègues n’ont pas eu le temps de sauter dans leur capsule de survie.
Ses yeux se mirent à s’embuer. Il détourna le regard quelques instants pour soigner sa pudeur.
J’ai essayé de le mettre à l’aise avec ça.
–Henry vous avez tout à fait le droit de pleurer devant moi vous savez. C’est normal ne vous inquiétez pas, j’ai l’habitude: cela restera entre nous.
Je lui tendais un mouchoir et je continuais pour ne pas m’appesantir davantage.
–Prototype ? Quel genre de prototype ?
Il sortit de sa torpeur et s’essuya les yeux avant de poursuivre.
–De nouveaux équipements sur le T10. Je bosse pour le compte d’Aegis. Un nouveau module qui aurait dû perturber le Basilisk, par émission de trains d’ondes pulsées transversales à résonance vibratoire!
…J’avais rien pigé, aussi je lui ai demandé d’essayer de m’expliquer ça encore une fois.
–On balance une espèce de gros son dont le but est d’entrer en résonance avec les modes vibratoires naturels des cœurs des Thargoids afin de les faire imploser ou à minima s’arrêter de battre. Le principe est très simple en réalité !
Il avait retrouvé le sourire à parler de son job, qui le passionnait manifestement. Il dû lire sur mon visage que j’étais totalement à côté de la plaque; il finit par ajouter:
–Un genre d’EMP anti Thargo quoi!
-Merci Henry, je comprends beaucoup mieux maintenant. Et alors ? Ca a donné quoi ?
-Rien du tout, on s’est fait agresser directement. Même pas eu le temps de dire ouf.
-Mais dites moi, on a pas retrouvé d’épave de T10 dans votre zone. Comment vous expliquez ça?
–C’est nous que le Basilisk a ciblé. Le directeur du programme était là dans une autre corvette. Les 2 vaisseaux nous ont abandonné à notre sort et ont sauté immédiatement.
-Le directeur du programme ?
–Je crois qu’il s’appelle Steinman. On ne le voyait pas souvent. Il fait parti des “huiles” vous savez. Il arrivait tout droit du labo central ce jour là…
J’arrêtais de prendre mes notes alors que je relevais la tête en direction de mon interlocuteur.
–Le Dr K.T Steinman ?…
–Oui c’est ça ! Vous le connaissez ?
-C’est un vieil ami…