15 Octobre 3305, Centre pénitentiaire Gaultier de Varennes
La guerre était temporairement calmée sur le front des Thargoids.
Repliés du côté des Pléiades, l’humanité pouvait soigner ses plaies et réparer les stations abîmées par les attaques sauvages Xénomorphes.
Steinman était toujours en attente de son procès. Il était comme à son habitude depuis quelques semaines, attablé dans sa cage de verre, à rédiger des mémoires, retranscrivant avec zèle les mérites de ses recherches, son insatiable obsession destructrice pour les aliens, son amour Infini de la supposée universelle supériorité de l’humanité…
Il était 11h, c’était bientôt l’heure de son entretien mensuel. Il arrêta d’écrire et rangea le fruit de son travail dans une pochette rouge.
Il entendait les pas de deux hommes qui s’approchaient de sa cellule.
Sans même regarder ses visiteurs, il lança :
–Vous êtes décidément de la race des vainqueurs mon cher ! Si vous saviez à quel point la ponctualité est la première qualité des hommes valeureux. C’est assez rare de nos jours…
-Professeur Steinman, votre visiteur vient d’arriver!
Le garde de la Phalange installa une chaise pour le visiteur devant la trappe de la cellule de haute sécurité.
–Uriel ! Quel plaisir de vous voir. Les visites sont font rares et j’avais hâte de vous livrer le fruit de ces quelques modestes souvenirs.
Uriel prît le temps de s’assoir avant de répondre.
–Qu’est ce que vous avez pour moi cette fois ?
Steinman s’installa face à son visiteur et lui déposa la pochette rouge dans le sas alors que le garde les laissait seuls.
–Et bien quelques expérimentations que nous avions menés sur des artefacts inconnus récupérés par vos successeurs.
Uriel récupéra le document et commença à se plonger dans sa lecture. Il devait faire vite, il n’avait que 30 minutes autorisées par visite, tout juste le temps de lire et de poser quelques questions avant de repartir.
Ce petit cinéma durait depuis presque un an, et même si Uriel savait que Steinman jouait la montre, il restait persuadé qu’il arriverait à en tirer quelque chose.
–Vous allez rire Uriel, mais sans y prêter attention je pense avoir été le premier à distiller ces saloperies !
Je suis en quelque sorte le père anonyme de l’UAlcool… Mais rassurez vous, je ne demanderai pas de royalties, au risque de mettre sur la paille vos employeurs et vos chers pilotes.
Uriel releva la tête, dépité de devoir écouter les attaques sournoises de ce cadavre en sursis.
–Au fait, vous ne m’avez pas dit: est ce que vous avez fini de mettre la main sur 9 CETI ?
-Je ne suis pas venu ici pour jacasser Steinman.
-Oh s’il vous plaît, les occasions sont tellement rares pour moi de savoir ce qui se passe à l’extérieur.
Uriel soupira mais au fond comprenait qu’il avait besoin d’améliorer la relation avec son interlocuteur s’il voulait l’amener à mieux coopérer.
–Oui, nous avons mis la main sur le système et surtout sur la technologie Guardian.
-C’est une excellente nouvelle Uriel ! Après Nyx, Ugrashtrim, et je ne sais plus quoi d’autre encore, je suis sûr que vous êtes désormais à la tête de la plus terrible armada anti Xénomorphes de la Galaxie, n’est ce pas ?
Uriel sentait son sang qui commençait à battre ses tempes. Ce vieil enfoiré venait de toucher un point sensible.
–Ce n’est pas le cas, n’est ce pas Uriel ?
-Non, merci de ne pas en rajouter comme ça…
Satisfait de lui, Steinman afficha son sourire carnassier.
–Vous pouvez encore vous persuader que cela viendra un jour, comme le fumeur dépendant au dernier stade se dit qu’il s’arrêtera le lendemain sans problème. Mais la vérité, vous la connaissez déjà, Uriel.
Uriel repensait à l’engueulade qu’il avait justement eu avec Alexandra et le Dictateur la semaine précédente à ce sujet. Malgré les promesses, le Consilium restait focalisé sur l’expansion de son territoire, encore et toujours, la DAX ne récoltant que les miettes.
–Laissez moi deviner Uriel ! Je suis sûr qu’il vous ont expliqué qu’il fallait agréger de nouvelles ressources pour encore “mieux” préparer la flotte. Il vous ont encore certainement dit qu’il n’y avait pas d’urgence avec des Thargoids repliés dans les Pléiades. Je me trompe ?
Uriel était à bout de nerf. Aussi détestable qu’il pouvait être, Steinman ne faisait que retranscrire la plus stricte vérité.
–Hum, laissez moi encore deviner. Je parie qu’ils ont jeté leur dévolu sur ADAD cette fois, un des derniers systèmes intéressant qui était autrefois au mains des EGC. Ça fait des années que cet objectif est en point de mire vous savez ?
Uriel sentait tout d’un coup la situation lui échapper
–Je passe ma seconde vie à préparer tout ce que je peux pour nous offrir une chance de réchapper à cette nouvelle guerre, mais on dirait que ça ne les intéresse pas.
-Le pouvoir et l’argent peuvent avoir ce genre d’effet sur des esprits faibles, Uriel. Ne leur en veuillez pas trop. Après tout, ils ne sont pas les premiers et ne seront pas les derniers à avoir renoncé à leurs idéaux. Et puis avec un peu de chance cette guerre contre les Thargoids n’aura peut être pas lieu finalement. Qu’en pensez vous Uriel ?
Une grande tristesse s’empara du pilote. Instinctivement, il caressa son bras où était tatoué son numéro de Rapture.
–Combien d’entre vous portent ils encore comme vous leur insigne jusque dans leur chaire Uriel ? Combien sont encore prêts à mourir en soldat, à vos côtés? Etes vous encore vous même un Black Birds ?
Uriel se leva, fou de rage.
–TOUJOURS ! je suis et resterai à jamais un Black Birds !
Steinman souriait, il respirait la sérénité.
–Parfait Rapture ! Vous savez donc ce qu’il vous reste à faire…
…/…