9 janvier 3304: journal de bord Alexandra Gidh
HIP 17692 A 1, Blackmount Habitation, camp de base de la Division Anti-Xénos.
Je venais d’arriver sur place à sa demande. Uriel était dans son bureau devant une pile de documents: les dossiers d’entrainement des membres du Squadron.
Il m’avait entendu entrer mais ne le releva la tête qu’au moment où je le saluais.
– Bonjour Uriel, vous avez demandé à me voir en urgence. Vous vouliez me montrer quelque chose ?
Il se recula avec son fauteuil roulant et alla jusqu’à la baie vitrée qui donnait sur les pads réservés aux Black Birds.
– Venez jeter un coup d’oeil et dites moi ce que vous voyez.
Je m’approchais. C’était le calme plat sur la base, évidemment… Le Squadron était réquisitionné sur GD 1192 et seuls les technodons s’affairaient sur les appareils qui étaient cloués au sol.
– Je suis désolée, mais nous avons un énorme problème à régler dans nos systèmes et…
– Vous êtes désolée? Je pense que vous n’avez pas bien compris les enjeux Alexandra! La guerre que vous menez là bas vous semblera bien futile quand les Thargoïds auront remplacés les ridicules bâtiments de la flotte fédérale aux portes de Munfayl, croyez moi!
…Il avait raison. Nous allions devoir revoir nos priorités rapidement.
– Vous aurez vos pilotes dès que possible Uriel! Je vous en fais la promesse!
– Pilotes ? Je suis content de l’apprendre. Parce que pour le moment, ceux que j’ai vu venir ici sont tellement doués avec un manche entre les mains que je doute qu’ils sachent pisser droit !
– …Vous ne pensez pas que vous exagérez un peu ?
– Evidement si. Il y en a un ou deux qui tiennent la route, mais pour l’essentiel les gars viennent ici comme on irait dans un camp de vacances. Beaucoup manquent de discipline. Je ne parle même pas de ceux qui arrivent tout droit sortis du Persephone, complètement bourrés, et qui repartent la tête aussi vide qu’elle est arrivée.
– Vous êtes là pour ça Uriel! Arrêtez de vous plaindre et imposez votre style ! Vous avez carte blanche pour remanier leur entraînement et imposer vos règles. Est ce que le matériel fourni répond à vos attentes au moins?
– De ce côté là oui, c’est plutôt pas mal. Les technodons font un travail de dingue et l’arrivée récente des armements de grande taille change radicalement la donne. De ce côté vous assurez bien.
– Les Médusa ?
– N’y pensez même pas pour le moment. Les gars ont trop peu d’expérience contre ces bestioles pour imaginer en sortir vivant. Il faut se concentrer sur les Basilisk pour le moment, les Cyclopes ne sont désormais plus un problème.
Nous avions au moins une chose qui fonctionnait. Cela faisait du bien à entendre, tant les mauvaises nouvelles s’accumulaient depuis quelques semaines. Uriel dut lire sur mon visage que quelque chose n’allait pas.
– Vous avez l’air fatigué, Alexandra. Vous devriez prendre un peu plus soin de vous, vous changer les idées.
C’était bien la première fois depuis longtemps qu’on se souciait de moi. Ca m’a tellement surprise que je n’ai pas su quoi répondre. Je suis restée là sans rien dire, comme une idiote.
– Vous avez quelques heures devant vous. Est ce que vous voulez aller les voir d’un peu plus près ? À defaut de vous reposer, ça vous fera une expérience un peu différente.
Luc qui se tenait en retrait jusque là se rapprocha de nous.
– Madame, je ne pense pas que ce soit une bonne idée !
Je me tournais vers Luc. Il avait probablement raison mais j’avais besoin de les voir. L’interception pendant le trajet m’avait montré à quel point nous étions vulnérables, démunis alors que notre vaisseau était rendu inerte par les Cyclopes qui étaient venus nous scanner.
– Je veux les voir Luc. Il faut que je les vois de mes propres yeux.
– Vous êtes venus avec Red si j’ai bien compris? Son Anaconda AX est prêt depuis hier justement. C’est clairement pas le plus doué mais c’est un bosseur, et ça sera l’occasion pour lui de prendre en main son nouveau jouet. On ne prend pas un grand risque: les vaisseaux tiennent suffisamment le choc maintenant, on a largement le temps de fuir avant que ça ne tourne mal.
Une pointe d’excitation montait en moi.
– Alors allons y messieurs, allons y maintenant !